Ines Assoual, Contrapposto
28e édition du Parcours de l’art, Avignon
Autrice : Fanny Hugot-Conte
Ce 8 octobre, sous l’une des voûtes de l’Église des Célestins à Avignon, Ines Assoual érige sous les yeux du public la sixième colonne constituant son installation. Faites de blocs de béton, cinq autres colonnes autoportées défient déjà les hauteurs de l’édifice. Oscillant dangereusement, ces figures surplombantes impressionnent d’autant plus qu’elles semblent sur le point de s’écrouler.
Entre œuvres et gros œuvres les structures d’Ines se situent au carrefour entre architecture, références classiques et chantier. Flirtant avec le danger son travail consiste à chercher l’équilibre tout en s’approchant au plus près du point de rupture. Ici elle convoque la figure du Contrapposto. Un terme employé à la Renaissance pour décrire les sculptures de corps maintenu sur une jambe, tandis que l’autre est fléchie ou suspendue dans le vide.
Invoquant la fragilité de la matière et du corps humain, Ines s’attelle à sa tâche mettant son corps à l’épreuve afin de dresser l’ultime colonne. Ici le terme performance n’a jamais aussi bien renvoyé à son double sens. Sous les yeux du public en tension, c’est un corps à corps intime avec la matière qui se joue. Une étreinte pour soutenir, une caresse pour s’assurer de la jointure, une griffure pour éviter le choc. Ines repousse les limites de sa propre résistance afin d’éviter l’accident tout en travaillant à augmenter le risque. À mesure que la colonne s’élève, l’effort physique se fait plus intense. La pression de la pesanteur et le vertige de la hauteur rendent chacune des manipulations plus périlleuse. À chaque élément disposé, le défi est un peu plus osé.
Enfin, sous le dernier bloc de béton, à bout de force, Ines doit faire preuve de la plus grande concentration. Elle vient y glisser une petite pyrite, élément sur lequel reposera le déséquilibre de chacune des colonnes. Car pour que son œuvre existe la possibilité d’un effondrement doit rester plausible.
Crédits photographiques : ©Parcours de l’art ©Ines Assoual