Collectif .dx
Autrice : Fanny Hugot-Conte
En transition ou réhabilités, les espaces qu’expérimente le collectif .dx sont autant d’interstices à occuper. Là où l’impermanence se fait palpable les performeur·euse·s y voient l’occasion de se jeter à corps perdu dans un ultime élan de vie. Force est de constater encore une fois que c’est dans les marges de notre société que l’on retrouve les jeunes artistes. Mais c’est finalement au prisme de ces ruines contemporaines que le collectif scrute le mieux les dérives de son époque. Dans le silence d’une usine désaffectée, une petite salle de théâtre plongée dans l’obscurité, une pièce froide au sous-sol, les performeur·euse·s de .dx se tiennent là, quasi immobiles. Visages éclairés par la lumière bleutée d’écrans de smartphones, airs oisifs et coques de graines de tournesol jonchant le sol. La rumeur monte doucement tandis que sous nos yeux la scène prend vie.
Le silence fait place à un bourdonnement entêtant. Les corps sortent de leur torpeur et se meuvent lentement. Animé·e·s par une ondulation érotique, iels glissent sur le sol, se rassemblent et forment une masse. La poussière imprègne la peau et les vêtements. Le gel pailleté colle aux doigts et glisse dans les cheveux. Les bandes musculaires colorées lézardent la peau pareilles à des peintures de guerre. On se pare, on se prépare à ce qui ne pourra qu’advenir. L’orage gronde, l’air s’électrifie, les mines sont graves et les regards se durcissent. C’est alors que les basses retentissent annonçant un corps à corps que l’on pressentait inévitable.
Le chaos déferle dans une énergie puissante et commune. Les corps se bousculent, s’enlacent, se heurtent et exaltent. L’essence subversive et transgressive de chacun·e implose. Entre le care et l’affrontement, les coups et caresses ne sont plus que des nuances.
À mesure que les corps et les sons se mêlent, la cacophonie laisse place au rythme de plus en plus clair et distinct. Animé de spasmes contagieux, le groupe comme un seul corps se lance dans une danse frénétique. Les pieds battent le sol, les corps se balancent à l’unisson et ce jusqu’à l’épuisement. Les muscles tétanisés tremblent, les respirations raisonnent tandis que les rougeurs apparaissent. La fatigue transpire les pores. Il faut résister, tenir bon. Face aux violences sourdes, dans un ultime effort avant la chute. Là où la rumeur grondait c’est à présent un chœur qui clame l’hymne d’une génération en rage. Ô corps libre reprend tes droits !